Alain Juppé a cosigné, le 1er août dernier, le décret n° 2011-920 qui modifie le décret n° 67-290 du 28 mars 1967 fixant les modalités de calcul des émoluments des personnels de l’Etat et des établissements publics de l’Etat à caractère administratif en service à l’étranger. Le syndicat CFDT-MAE a déjà salué à plusieurs reprises les grandes lignes de cette réforme du régime de rémunération des agents de l’étranger : simplification et réduction du nombre de grilles d’indemnités de résidence, harmonisation des grilles, fonctionnalisation des IR permettant de répartir les agents de catégorie C sur trois groupes au lieu d’un, remise à niveau des majorations familiales.
Mais nous contestons l’article 6 du décret précité. Celui-ci prévoit qu’« il est inséré au décret du 28 mars 1967 susvisé un article 15 bis ainsi rédigé : Lorsque deux agents sont mariés ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité et ont une résidence commune à l’étranger, leur indemnité de résidence à l’étranger est respectivement réduite de 10 %.»
Comme nous l’écrivions dès le mois d’avril dernier [1] « en acceptant l’abattement de 10 % sur l’IR de chaque agent expatrié en poste double dans ses négociations avec Matignon et Bercy sur la réforme des IR, l’administration crée de l’injustice et de l’arbitraire. »
Cette mesure est injuste. En effet les agents en poste double connaissent les mêmes contraintes, les mêmes sujétions, la même charge de travail, les mêmes responsabilités et les mêmes conditions de vie que leurs collègues célibataires. Ils subissent les mêmes permanences et les mêmes astreintes et ils effectuent les mêmes heures supplémentaires non payées que leurs collègues, multipliées par deux.
Cette mesure est arbitraire. Si l’abattement est motivé par une politique d’économies budgétaires, on ne comprend pas pourquoi l’écrêtement devrait porter exclusivement sur les agents mariés ou pacsés plutôt que sur les célibataires ou sur les agents vivant maritalement.
Si l’abattement vise plutôt à prendre en compte la part de l’IR liée au logement, elle le fait de manière arbitraire : ce ratio de 10 % est appliqué de façon uniforme sur l’ensemble du réseau alors que le poids du logement dans la rémunération varie énormément d’un poste à l’autre.
De plus, l’écrêtement de 10 % vient s’ajouter à la retenue opérée sur le salaire de nos collègues qui occupent un logement de l’Etat (10 % pour les agents de catégorie C, 15 % pour les A et B).
Cette mesure est socialement incompréhensible. L’administration a perdu une excellente occasion de mener enfin la réforme du logement des agents à l’étranger que nous réclamons depuis dix ans. Ce n’est pas en tirant les rémunérations vers le bas que l’on réglera le problème !
Alors que le ministère proclame qu’il souhaite mettre en œuvre une politique en faveur des couples, incitative pour les conjoints, cet abattement décourage un peu plus les agents dont la situation est déjà source d’économies pour le Département (frais de mise en route unique, absence de supplément familial).
La CFDT a déposé un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat concluant à l’annulation de l’article 6 instituant un écrêtement des rémunérations de nos collègues en poste double.
[1] La Lettre du syndicat CFDT-MAE n° 205, pp. 3 et 4