Dans le premier épisode de cette série, nous avions laissé nos « C » moroses mais décidés, en quête d’une reconnaissance de leur spécificité et de leurs compétences. Zoom cette fois sur ceux qui sont actuellement à l’étranger. Que pensent-ils de leurs revenus, de leur charge de travail, de leurs conditions de vie ?
Evidence à signaler d’emblée : ils ne se trouvent pas tous à la même enseigne. Selon les résultats de notre enquête, sur 10 agents à l’étranger, 2 se risquent dans des zones classées A (c’est-à-dire là où l’indemnité de résidence va tenter de compenser des conditions de vie « particulièrement rigoureuses ») ; 3 se retrouvent dans des postes intermédiaires classés B ; les 5 restants font valoir leurs talents là où la vie est censée se dérouler comme un long fleuve tranquille (et, revers fréquent de la médaille, là où elle coûte plus cher…).
Conséquence logique de cette précision préliminaire : les réponses concernant l’indemnité de résidence à l’étranger (IRE) sont mitigées, notamment quand on évoque son adéquation au lieu d’affectation. On est à 50/50 : 50 % d’agents affectés en zone C, 50% d’agents qui trouvent que l’IRE n’est pas adaptée à leur affectation. De là à penser que les premiers correspondent aux seconds et que ceux qui s’aventurent dans des postes difficiles y trouvent tout de même une bonne raison d’y rester, il n’y a qu’un pas… que nous nous garderons bien de franchir. Tant d’autres paramètres peuvent entrer en jeu dans l’appréciation d’un revenu.
Les majorations familiales par exemple : seule une moitié des agents interrogés les touche. Elles satisfont une partie d’entre eux tandis que les autres trouvent qu’elles ne permettent pas de subvenir convenablement à l’entretien et à l’éducation de leurs enfants. Il est vrai que les frais de scolarité varient considérablement dans le monde, jusqu’à devenir exorbitants à San Francisco ou à Tokyo, pour ne citer que ces deux champions parmi tant d’autres.
Des frais qui gonflent souvent comme ceux des logements. Ah, le logement ! Une difficulté pour 40% d’entre vous, essentiellement pour des raisons financières, dans des villes où l’on regarde souvent les expatriés « comme des poules aux œufs d’or ». Mais au bout du compte, rares sont ceux qui ne se satisfont pas de ce qu’ils ont trouvé (seulement 8%), à moins de 30 mn du lieu de travail (à 75%), quitte à y passer plus de 30 % de leur IRE (pour plus de la moitié), voire plus de 40 % (pour 25% d’entre vous), voire plus de 50%…
Le supplément familial ne concerne qu’une grosse moitié d’entre vous mais n’a pas l’air de faire l’unanimité de ceux qui y ont droit : près de 35 % ne le trouvent pas adapté. Là encore les situations personnelles divergent. Quelques conjoints ont trouvé un travail, souvent à l’ambassade ou au consulat, mais la recherche d’un emploi reste mission impossible pour les trois-quarts de ceux qui y sont confrontés. Alors quelles solutions à part le non-emploi forcé et le célibat géographique en attendant la retraite ?
Majorations familiales, supplément familial…. Au chapitre du porte-monnaie, restent l’indemnité d’établissement et l’indemnité de changement de résidence (ICR) qui satisfont une petite majorité, tout comme le temps de séjour : au bout du compte, un tiers tout de même des agents ne parviennent pas à s’offrir le billet d’avion annuel si l’administration ne le prend pas en charge.
En revanche, un consensus se dessine nettement contre la fonctionnalisation : près de 80 % la ressentent comme non adaptée. On lui reproche surtout de ne pas correspondre à la réalité sur le terrain. Rappelons que la mise en place des 3 groupes d’IRE en 2011, à défaut d’une cartographie précise des emplois à l’étranger, devait justement tenir compte des responsabilités et des sujétions particulières de certaines fonctions assumées par les « catégorie C », indépendamment des charges de travail variables d’un poste à un autre.
Mais la CFDT était dès le départ bien consciente qu’elle permettait surtout à la DRH de rendre plus attractifs des postes qui ne l’ont jamais été (régisseur, responsable visas, secrétaire de chef de poste…). Pas étonnant donc qu’on retrouve dans notre enquête les défaillances d’un système bancal dès le départ : « l’agent en grille 12 qui fait le travail de l’agent en grille 11 ou 10 », « la masse de travail différente selon la taille du poste », des « C qui se retrouvent au four et au moulin »….
Car dès qu’on aborde les conditions de travail, le tableau vire au sombre. Les permanences en poste, et ce n’est une surprise pour personne, près de 90 % d’entre vous y sont confrontés… sans aucune possibilité de récupération ou si peu. Les heures supplémentaires, ce sont 85 % qui s’y collent, en général de façon fréquente ou très fréquente, et bien sûr encore, sans guère de possibilités de récupérations.
Lorsqu’on évoque la charge de travail, c’est pour dire qu’elle est « trop importante ». Et si beaucoup pensent que la situation se dégrade depuis quelques années, c’est pour pointer qu’on demande aux « C » toujours plus de polyvalence et que l’organisation des services laisse à désirer. C’est aussi la faute à la suppression des postes, qui revient comme un leitmotiv dans vos remarques, et à ses corollaires : « manque de personnel », « on nous demande toujours plus », « effectifs critiques », « surcharge », « mauvaise répartition », « difficultés pour prendre des congés »…
Et la Charte de temps, dans tout ça ? Bafouée selon vous plus de la moitié du temps… On connait encore trop mal les outils qui permettent de poser ces questions sur la table : CTPE (comité technique de proximité à l’étranger), obligation de l’administration en matière d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (HSCT), Registre Santé Sécurité Travail (RSST) qu’à peine 3% d’entre vous ont déjà eu l’occasion d’utiliser…
Il faut dire que dans la tempête, vous gardez tout de même bon caractère : près de 60 % d’entre vous restent satisfaits de leurs conditions de travail. Elle en a de la chance, l’administration, de compter sur des agents aussi magnanimes !
L’enquête sur les « C » continue… Ne ratez pas notre prochain épisode : les « C » reviennent en centrale !