On pouvait croire révolu le temps des jets privés, des cigares, et des dépenses somptuaires de cet acabit. Il n’en est apparemment rien. Ainsi de la décision, révélée par la presse, de la Ministre de la Francophonie de recourir aux services d’un vol spécial par Falcon pour rejoindre le Sommet de la Francophonie à Kinshasa; et ce alors même que cette grande capitale africaine est reliée au reste du monde, directement, par des compagnies aériennes fiables, au départ de Paris, pour un coût infiniment moindre. Les justifications déversées après coup en catastrophe (notamment des questions de sécurité relatives à une autre mission greffée entretemps sur le programme de la Ministre), ne changent rien à l’affaire.
Sur le fond, cette dépense est en effet choquante, pour au moins trois raisons : d’abord parce qu’il s’agit d’un emploi particulièrement dispendieux de l’argent du contribuable, dont on sait qu’il sera très prochainement appelé à un effort accru pour participer à la maîtrise des comptes publics. Ensuite parce qu’il y a quelques jours à peine le Ministre Laurent Fabius confirmait aux agents et aux partenaires sociaux que le budget du Quai, pourtant déjà très contraint, devrait prendre sa part à la diminution de la dépense publique, et que cela se traduirait, de 2013 à 2015, par des baisses budgétaires significatives et la suppression de pas moins de 600 emplois.
Enfin parce que depuis des années, dans la grande majorité, les agents se voient précisément opposer la contrainte budgétaire à des demandes d’une meilleure prise en compte de l’augmentation du coût de la vie à l’étranger, d’une protection sociale digne de ce nom, de formation, de revalorisation de leur carrière en contrepartie des efforts de productivité exigés par les RGPP successives, etc.
Il faut le dire : la décision de la Ministre est aussi dispendieuse que désastreuse. Elle porte à trois le nombre de Ministres, au sein d’un Quai qui n’en compte pas moins de cinq, qui en quelques semaines ont eu les “honneurs” de dépenses contestées et contestables. Pendant ce temps, aujourd’hui comme hier, la fracture au sein du Ministère s’accentue entre une croisière, qui s’amuse, et les autres, qui galèrent.