Bientôt les élections : l’occasion de renouveler le CTPE et la CCL de votre poste. Vous seriez bien candidat… mais vous ne connaissez pas bien le fonctionnement de ces « machins-là » et leur rôle essentiel dans la vie des implantations de l’Etat français à l’étranger. Vous ne savez pas trop comment ça marche, le dialogue social en poste, ni en quoi ça consiste, être représentant… Nous avons interrogé plusieurs d’entre eux qui ont tenté l’aventure lors du précédent scrutin sous les couleurs de la CFDT. Certains étaient alors, comme vous, complètement novices en la matière : ils vous racontent leur expérience.
Être à l’écoute et convaincre les collègues de s’engager !
Avec un premier constat : oui, cela prend un peu de temps d’être représentant du personnel en poste. Notamment pour préparer des réunions qui, pour le CTPE ou la CCL, ont lieu au moins deux fois l’an. Si l’on veut avoir son mot à dire et ne pas simplement entériner un ordre du jour cousu main par le SCG, il faut donc battre le rappel en amont, identifier les questions qui devront être posées, entendre les avis de ceux dont on est le porte-parole : « il faut prendre le temps de se mettre à l’écoute des collègues et de leurs problèmes, voire de leur souffrance » raconte l’un d’eux, membre d’un CTPE depuis trois ans.
Mais les représentants ne sont pas seuls en cela. Il y a souvent avec eux une équipe, dont il est important qu’elle soit à la fois soudée et représentative de tous les services concernés. Ce qui n’est pas toujours facile à mettre en place : l’une des personnes interrogées se souvient des difficultés pour « avoir une liste équilibrée entre titulaires et ADL », une autre des moments passés à « convaincre les agents de se présenter, les convaincre que c’est dans leur intérêt de le faire… et dans leur intérêt d’aller voter ! ». Des moments pris sur un agenda souvent déjà chargé : « on ne peut pas forcément y consacrer tout le temps qu’on voudrait, on a aussi notre travail à faire »…
Est-ce difficile ?
Être représentant, est-ce vraiment difficile ?« Ce n’est pas le mot idoine, dit l’un d’eux, c’est un travail enrichissant, qui permet d’établir des ponts avec l’administration, et c’est aussi un challenge ! ». Une élue CFDT depuis 2009 se demande même « pourquoi, en France, être représentant du personnel est perçu comme quelque chose de négatif, alors que c’est une expérience intéressante ! ».
Mais tous n’ont pas le même enthousiasme. Pour l’un d’eux, au contraire, « ce n’est pas difficile, c’est simplement très inconfortable. Le conseil donne un avis et ne prend pas de décision, comme pour toute chose dans une ambassade, puisque c’est le chef de poste qui prend toutes les décisions. On se demande par moment pourquoi on se réunit puisque le conseil n’influence jamais les décisions de l’ambassadeur… un ambassadeur qui réunit le CTPE parce que cela lui est imposé par Paris… » Aïe, la vie n’est donc pas toujours rose dans le royaume merveilleux du dialogue social en poste. Ce que résume l’une de nos représentantes, qui qualifie une première expérience en CTPE et CCL de « très difficile » : « pas évident de défendre l’indéfendable ! »
« C’est difficile surtout », tranche un autre, « si les revendications n’aboutissent pas : le personnel est mécontent et crie à l’inaction du représentant ». Secrétaire d’une section CFDT, il précise aussi que le dialogue avec l’administration se complique « quand il s’agit de revendications d’ordre pécuniaire », ou que l’on discute « d’avantages non prévus dans le code du travail local ».
Une caisse de résonance…
Car tous s’accordent sur un point : le représentant est un « tampon entre les représentants de l’administration et les agents », ou plutôt une « caisse de résonance »… Un rôle qui peut avoir des conséquences diverses : l’un a le sentiment « d’être plus respecté », une autre l’impression d’être devenue « le vilain petit canard !». Car ceux que l’on défend ne sont pas toujours reconnaissants : « Les collègues ne voient pas bien l’intérêt des messages que vous leur envoyez pour les interroger, pour rendre compte… ». Ou bien ils ne comprennent pas votre hiérarchie des priorités : « au moment de préparer les ordres du jour des réunions, chacun trouve sa question prioritaire et aimerait avoir une réponse immédiatement ».
« On essaie d’être un interlocuteur légitime » dit l’un, et ce n’est pas toujours facile répond l’autre : « certaines questions sont complexes et prennent nécessairement du temps, mais les agents n’en sont pas forcément conscients ». Sans compter qu’en face, le représentant de l’administration, lui, n’est pas toujours rompu à la pratique du dialogue social. On peut avoir affaire tour à tour avec un « ambassadeur qui ne supporte pas les avis contraires », et avec un premier conseiller « ouvert au dialogue et capable de prendre en compte l’histoire du poste et les opinions des uns ou des autres ». Devinez celui qui laisse le souvenir le plus cuisant…
Malgré les difficultés, la satisfaction d’agir et de prendre l’initiative…
Ils ont tous eu des moments de découragement, nos représentants : « quand nous n’avons pas pu éviter le licenciement d’un collègue », quand l’ambassadeur « a fait mine de ne pas être au courant » d’une situation de harcèlement qu’il connaissait pourtant, ou quand on s’entend dire « que de toute façon, ces commissions ne servent à rien ». Pourtant, la plupart d’entre eux persistent et signent : prêts à poursuivre l’expérience, ils se représentent aux prochaines élections. Malgré les difficultés qu’ils rencontrent, trouveraient-ils aussi quelques satisfactions ?
« La satisfaction d’agir », précise l’un d’eux, élu dans les deux derniers postes où il a été affecté : « au lieu de rester les bras ballants face à ce qui ne va pas, on peut prendre l’initiative et tenter de faire bouger les lignes ». On n’est d’ailleurs pas seul à batailler : le syndicat est là pour épauler les représentants, les informer, les conseiller, les soutenir. Il ne faut pas hésiter à l’interroger en cas de doute : ses permanents peuvent avoir l’idée qui vous permettra de sortir de l’impasse, ou le contact qui débloquera une situation. La CFDT-MAE organise aussi des missions à l’étranger qui sont l’occasion d’apporter sur le terrain son expertise ou de former ses élus.
…Et de faire avancer les choses !
Et puis il y a, par-dessus tout, la satisfaction des victoires que l’on remporte. Car n’en déplaise aux désabusés de naissance, on ne se démène pas pour rien : « une augmentation générale de la grille des salaires du poste », « la validation d’un nouveau système de congés », « l’obtention d’une autre semaine de congés payés »… « Chaque petite avancée donne motif à se réjouir ». « On vit de bons moments et parfois des moments difficiles ; on donne de son temps, de son énergie, mais au bout du compte, on s’enrichit au contact des autres », conclut une représentante qui sera candidate CFDT, cette année encore, lors du scrutin de décembre prochain. Parce qu’elle en est consciente : le dialogue social en poste, « en définitive, c’est une grande chance… ». Une chance de se faire entendre, une chance de changer les choses… une chance à saisir.