Lors de la réunion du 6 avril 2020, organisée par le Ministre qui a souhaité réunir les organisations syndicales, la CFDT a porté le message suivant :
Monsieur le Ministre,
Monsieur le Secrétaire général,
Mesdames et Messieurs les Directrices et Directeurs,
Mesdames, Messieurs,
Merci à vous, Monsieur le Ministre, d’avoir provoqué cette réunion.
La dureté des temps rappelle cruellement combien le service public est précieux, et combien la note à payer est lourde lorsqu’on le malmène et qu’on réduit de manière drastique ses moyens humains et matériels. Comme vous le savez, cela se décline de manière parfois tragique dans notre ministère.
Il nous revient du terrain un sentiment qu’on affronte cette crise à mains nues, et il faudra bien qu’on réponde enfin à la question cruciale de la définition des missions de ce ministère. On continue à demander aux postes, avec ce qu’il reste de personnels, de moyens, mutualisés de surcroît, les tours de force qu’on leur a demandés, parfois d’importance vitale, et qu’on va encore leur demander.
On est parti dans l’idée de rapatrier tous les Français en déplacement à l’étranger (le chiffre affiché était de 130 000), l’idée est certes louable, mais … au bout du compte ?
Des Français et qui ont passé leur temps à se plaindre sur les antennes, sur les réseaux sociaux, que «l’ambassade, le consulat ne répond pas, on nous oublie, on est abandonné, etc…»
On nous dit qu’on a le meilleur système de santé au monde, on l’a désarmé, on nous dit qu’on doit être fier de notre présence partout à l’étranger, on a subi le même sort. La reconnaissance, c’est bien, avec les moyens, c’est mieux.
La CFDT a rappelé lors des réunions hebdomadaires à l’employeur Etat qui engage sa responsabilité dès lors qu’il ne met pas tout en œuvre pour assurer la sécurité au travail de ses personnels, le besoin d’instructions claires, en direction de tous, et la mise à disposition des moyens de protection et de travail adaptés.
I- Dans l’immédiat
Il s’agit d’assurer la sécurité et santé des agents
- La sécurité des agents et de leurs familles dans les pays où la situation est explosive, en particulier l’Afrique, où nombre d’Etats sont très peu armés pour faire face à une telle pandémie, où le confinement est très difficilement applicable, où le système de santé est défaillant, notre syndicat s’inquiète du sort qui pourrait être fait à l’ensemble des personnels travaillant dans nos emprises, au moment où la pandémie va prendre de l’ampleur dans ces pays.Si des consignes strictes de confinement ont d’ores et déjà été adoptées par nos ambassades dans beaucoup d’endroits, quelle réponse notre ministère sera en mesure d’adopter lorsqu’il y aura des malades à prendre en charge et qu’ils ne pourront être convenablement suivis sur place ?
– Nous souhaiterions dès lors savoir si un plan est d’ores et déjà prévu au niveau ministériel afin de ne pas être pris de court le moment venu.
– A la NDI du CAPS du 24 mars 2020 « L’effet pangolin », la tempête qui vient en Afrique : quelles réponses ?
– A cela s’ajoute le fait que dans plusieurs endroits du monde, on assiste à la montée d’un sentiment de défiance pour ne pas dire plus, vis à vis de la France, dans certains pays de tradition francophile.
- La santé : de nos postes, on nous fait retour d’inquiétudes sur le manque d’équipements et de produits de protection, arrivés au mieux tardivement, au pire encore manquants, même si des progrès ont été fait dans ce sens, comme cela a pu être constaté, au moins en administration centrale vendredi dernier.Mais dans les postes ? La question des masques et ce n’est pas la seule, reste préoccupante.
Le manque de matériels permettant aux agents d’assurer dans de bonnes conditions la permanence du service public : ce qui est fait par les personnels du ministère tient du miracle par rapport à la carence manifeste d’outils de travail adaptés dont la pénurie appelle à une distribution qui ne correspond pas aux réels besoins de la continuité du service public. A cela s’ajoutent les difficultés locales qui ne facilitent pas les choses.Et lorsqu’ils existent, ces matériels qui permettent de travailler à distance, on ne peut en tirer les mêmes conséquences en France et à l’étranger. Les « bloqués » en France par la pandémie en savent quelque chose, quand ils voient que leur rémunération va être amputée. - Une inadaptation de la réglementation à la situation actuelle, inadaptation à laquelle il convient de remédier à court et moyen terme, sujet qui nécessite une réflexion de fond, dans laquelle la CFDT prendra toute sa part.
II – Dans un avenir qu’on espère proche, lorsque viendra le retour progressif à la normale
- Surveillance médicale et soutien psychologique
La surveillance médicale devra s’exercer sur les agents en poste : il faudra tester les agents, repérer les immunisés, sur les partants de France vers les postes : va-t-on envoyer en poste des agents dont on ne connaît pas la situation vis à vis du Covid-19 dans des pays où le système de santé est défaillant ?Elle devra s’exercer sur les partants d’un poste vers un autre poste, sur ceux qui rentrent de poste vers la France, et également s’exercer sur ceux qui restent en administration centrale. Pour tous, se posera la question des tests, des mesures de prévention et de la surveillance médicale.La situation nécessitera un soutien psychologique en premier lieu naturellement pour ceux qui auront été en première ligne, mais probablement pas seulement pour eux.
- Sortie de crise et après crise : il ne faudra pas sous-estimer les difficultés de l’«après», le retour progressif et étalé dans le temps, et les effets différés de la crise.
La gestion des congés : on aura besoin d’instructions claires sur les congés non pris : le report, certes qui est en négociation en interministériel, mais également sur les congés à prendre au titre de l’année en cours : balance la préservation de la santé des agents/continuité du service public devra pencher en faveur de la priorité que constitue la préservation de la santé des agents.Le mouvement et sa gestion : l’objectif reste fixé en septembre, mais il risque d’être, par ricochet, impacté par de possibles révisions des vœux :
- De la part d’agents partant dans des pays où la crise est gérée par un confinement à l’arrivée,
- De la part d’agents dont les enfants dépendent de rythmes scolaires,
- De la part d’agents qui pourraient remettre en cause une expatriation familiale pour ces mêmes raisons
- Repenser les modes de travail
Le travail à distance/télétravail ne saurait davantage être « empêché » en raison de la rareté des équipements qui le rend en pratique impossible.Pour le télétravail, un assouplissement de la réglementation est en cours, mais pour le travail à distance, pour ce qui est de l’étranger, il doit faire partie de la réflexion et ne pas se heurter à une mise en œuvre limitée par les dotations insuffisantes en matériels.Sur le travail à distance, les circonstances actuelles démontrent si besoin en était, son utilité, quand bien même on habite près de son lieu de travail, d’où la nécessité de ne pas l’écarter à l’étranger.Il conviendra enfin d’adapter la réglementation, qui ne répond pas aux besoins dans des circonstances actuelles.
En conclusion, on demande au gouvernement dont vous faites partie, Monsieur le Ministre, de réarmer ce ministère. Lui aussi, il peut sauver des vies,
Au nom de la CFDT, je vous remercie.