Cette fin d’année est l’occasion pour la CFDT-MAE de revenir sur la réforme de l’expertise française, l’un des thèmes majeurs abordés lors des deux rencontres informelles, des 14 avril et 3 novembre 2016, avec la direction générale de la mondialisation. Ces deux réunions ont été présidées par la directrice générale de la mondialisation, de la culture, de l’enseignement et du développement international (DGM), entourée du directeur général adjoint (DGM2) et du délégué des programmes et des opérateurs (DGM/DPO). La direction des ressources humaines est représentée par l’adjoint à la cheffe de bureau RH1D lors de la première réunion et par le sous-directeur RH1 et la cheffe de bureau RH1D, au cours de la seconde. Nadine Monchau, Anne Colomb, Sihem Aidel et Thierry Franquin représentent la CFDT-MAE.
Principe et objectifs annoncés du transfert de la gestion des experts techniques internationaux (ETI)
La directrice générale rappelle le recentrage des activités de l’administration centrale sur la diplomatie du développement et sur la stratégie. La nouvelle direction du développement durable (ex-DBPM – biens publics mondiaux) est chargée de la définition des stratégies, des négociations internationales et des orientations et des tutelles des institutions et des opérateurs. L’objectif est de mettre le dispositif au niveau de nos principaux partenaires européens et de s’appuyer pleinement sur la spécialisation des opérateurs dans leur domaine de compétence et aussi de diversifier l’offre d’expertise de mission à court terme et d’expertise perlée (appuis ponctuels réguliers). Le DGM2 précise que les principaux opérateurs ministériels de l’expertise française ont été fédérés. Il explique que l’intérêt de cette mesure est de pouvoir permettre, à l’avenir, que les missions d’expertise se fassent en synergie avec les missions portées par l’opérateur lui-même sur financement tiers et en particulier européen.
La DGM indique, en ce qui concerne le pilotage de l’Agence Française de Développement (AFD), que la signature d’un prochain contrat d’objectifs et de moyens permettra un rapprochement avec la caisse des dépôts et consignations (CDC).
La CFDT intervient en indiquant que l’AFD, établissement public industriel et commercial (EPIC) et la CDC, établissement public « sui generis » (à statut spécial et qui est placé sous l’autorité du Parlement), sont deux entités juridiques différentes et constate, malgré le rapprochement, qu’il n’y aura pas de fusion, comme on aurait pu l’envisager de prime abord (cf. projet du Président de la République d’intégrer par la loi l’AFD au sein du groupe CDC).
La DGM souligne que ce n’était pas forcément l’objectif premier et que le principal est que l’Etat soit fortement présent dans la gouvernance de l’AFD. Elle poursuit en précisant qu’un vade-mecum, permettant de clarifier la tutelle, a été défini lors du dernier comité des opérateurs, le 26 octobre, dernier et qu’il sera bientôt disponible sur Diplonet.
330 emplois sont concernés pour la période 2016-2018
La directrice générale rappelle que le transfert de gestion des ETI se déploie sur 3 années de 2016 à 2018 et que le schéma porte sur 330 ETP sur un total de 370 au départ, compte tenu du maintien du rattachement des ETI de la direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) au bureau des experts techniques internationaux et des coopérants militaires (RH3C). Le transfert porte sur la totalité des ETI – hors gouvernance bilatérale – désormais gérés par Expertise France et des ETI de la gouvernance bilatérale qui relèvent dorénavant de l’AFD. Le calendrier est lié aux dates de fin de mission et de fins de contrat des experts techniques internationaux (ETI) : 93 pour 2016 (72 pour Expertise France et 21 pour l’AFD) et environ 130 pour 2017 ; une note diplomatique, adressée aux postes, en précisera d’ailleurs les modalités.
« Pertes en ligne » de 25% des experts techniques internationaux (ETI)
La CFDT demande des précisions sur les chiffres et en particulier sur le taux de « pertes en ligne » annoncé de 25% de l’offre de l’expertise française et le nombre de missions d’expertise perlée.
Le Délégué DPO indique que le volume d’expertise va être réduit avec l’espoir que la montée en charge de l’opérateur et sa spécialisation entraîneront une plus grande capacité à répondre à des appels d’offres de bailleurs internationaux, comme la Commission européenne. Il confirme le taux de remplacement de 75% de l’effectif des postes d’ETI sur le terrain puisque le portage des ETI par les opérateurs va donner lieu à un certain nombre de charges sociales supplémentaires et également à des frais de gestion. Sur les 72 transferts à Expertise France, 20 ETP ont été supprimés en programmation des effectifs et sur les 52 postes définis comme prioritaires par le Département, 39 missions d’assistance technique vont être pourvues, ce qui représente un différentiel de 5 % plus favorable que la perte de 30% qui avait été annoncée à l’origine (pm. lors de la réunion d’avril 2016), la perte étant évaluée à ce stade à 25 %. Pour l’expertise perlée, 2016 est une année de transition et les procédures pérennes se mettront en place plutôt en 2017.
La DGM passera commande à l’opérateur
Le DGM2 indique que 2016 est une année de transition budgétaire mais aussi organisationnelle puisqu’il faut trouver de nouvelles manières de fonctionner : la DGM passera commande de missions d’expertise avec un cahier des charges et c’est l’opérateur qui recrutera les experts nécessaires pour la mise en œuvre de ces missions. En 2016, le calendrier a été particulièrement serré car il a fallu assurer les relèves à l’été avec le moins de tensions possible pour les postes à l’étranger : dans ce contexte, les nouvelles procédures se mettront plutôt en place en 2017. Celles-ci, rappelle le Délégué DPO, devront être rédigées d’un commun accord et concerneront l’expression du besoin, l’étude de la programmation, l’objectif de l’opérateur, le cahier des charges et le montant associé.
Quid du recrutement des profils ?
En réponse aux organisations syndicales, le directeur général adjoint énonce que des cahiers des charges seront fixés à l’opérateur pour les missions à remplir qui serviront de base aux recrutements des experts. Un ETI, en général, est placé auprès d’un partenaire étranger qui définit ses besoins en relation avec les ambassadeurs. En amont, la DGM restera en contact avec l’opérateur sur le bilan de la programmation précédente, par exemple, ou la programmation de l’année N+1. Le travail d’organisation de la programmation et de la passation de la commande se fera en lien avec les ambassades, les directions sectorielles et l’opérateur.
Une tutelle « renforcée » sur les opérateurs ?
Suite à une demande des OS, la DGM indique que la tutelle est un volet majeur qu’il convient de renforcer et de professionnaliser tout en évitant de faire de la micro-gestion qui relève du rôle des opérateurs. La direction générale de la mondialisation a élaboré, à la demande du secrétaire général et en conformité avec la circulaire du Premier Ministre, un plan d’actions en matière de pilotage des opérateurs. La DGM affirme que le renouvellement des contrats d’objectifs et de moyens (COM) ou de performances est un cadre privilégié pour confirmer, définir et réajuster les orientations stratégiques des opérateurs. Le DGM2 précise que la tutelle d’Expertise France s’inscrit dans un exercice de tutelle globale : avec l’AEFE (contrat signé le 29 juin), Business France (contrat du 6 octobre 2015), Atout France (signature du 2 juin), l’Institut français (en cours de finalisation), Expertise France (signature du 23 juin) et Campus France (en cours d’élaboration). La direction générale de la mondialisation a travaillé également sur les autres outils de pilotage stratégique que sont les lettres de mission, d’une part, et les lettres d’objectifs annuels, d’autre part, en précisant les champs d’actions afin de rendre ces documents plus opérationnels.
Commentaire :
La CFDT déplore que la mise en œuvre des mesures « MAEDI21 » concernant le réseau culturel et de coopération conduise, d’ici trois ans, à une réduction d’environ 25% de l’offre d’expertise technique française, un des vecteurs essentiels de notre « diplomatie d’influence », sans aucune garantie ni de l’effectivité réelle de la tutelle de la DGM exercée sur les opérateurs (AFD et Expertise France), ni de la concrétisation des possibilités accrues de financement mises en avant par l’administration afin de justifier ce transfert de gestion. Et ce n’est pas la faiblesse constatée des moyens humains alloués, au sein de la DGM, pour assurer l’exercice concret de cette tutelle qui va réussir à lever les craintes et les doutes que la CFDT-MAE a toujours exprimés à ce sujet.